Dans un contexte législatif en constante évolution, il est essentiel pour les praticiens du droit et les entreprises de comprendre les implications des réformes récentes en matière de droit pénal des affaires. Cet article se propose d’examiner les principales modifications législatives et réglementaires qui ont eu un impact significatif sur la pratique du droit pénal des affaires en France.
La mise en place de la loi Sapin II
Adoptée le 9 décembre 2016, la loi Sapin II a introduit des changements majeurs dans le paysage juridique français en matière de lutte contre la corruption et la fraude. Parmi les principales dispositions figurent l’obligation pour les grandes entreprises d’établir un programme de conformité, la création de l’Autorité française anticorruption (AFA) et l’introduction d’une nouvelle procédure négociée, la Convention judiciaire d’intérêt public (CJIP).
Cette dernière permet aux personnes morales mises en cause pour certaines infractions, notamment la corruption ou le trafic d’influence, de conclure une convention avec le procureur de la République afin d’éviter une condamnation judiciaire. En échange, l’entreprise doit s’acquitter d’une amende dont le montant ne peut excéder 30% du chiffre d’affaires moyen sur les trois dernières années.
Le renforcement de la responsabilité pénale des entreprises
La loi du 24 septembre 2018 relative à la lutte contre la fraude a également renforcé la responsabilité pénale des entreprises. Elle prévoit notamment l’extension de la notion d’infraction fiscale en cas de fraude fiscale commise avec l’aide d’un tiers, ainsi que l’aggravation des sanctions encourues pour certaines infractions financières.
Ainsi, les entreprises doivent désormais être particulièrement vigilantes quant à leur gestion interne et aux risques liés à la commission d’infractions financières ou fiscales.
L’évolution du régime de sanction des abus de marché
Les abus de marché constituent une autre problématique majeure en matière de droit pénal des affaires. La règlementation européenne MAR (Market Abuse Regulation), entrée en vigueur le 3 juillet 2016, a instauré un cadre harmonisé pour lutter contre les abus sur les marchés financiers. Cette réglementation a été transposée en droit français par l’ordonnance du 8 décembre 2016.
Ce nouveau cadre légal renforce les pouvoirs de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et impose aux entreprises cotées une série d’obligations, notamment en matière de divulgation d’informations privilégiées et de déclaration des opérations réalisées par leurs dirigeants.
La prise en compte des lanceurs d’alerte
Enfin, la protection des lanceurs d’alerte est devenue un enjeu majeur dans le domaine du droit pénal des affaires. La loi Sapin II a instauré un régime juridique spécifique pour les lanceurs d’alerte, garantissant leur anonymat et leur protection contre les représailles.
Cette évolution législative est un signal fort envoyé aux entreprises, qui doivent désormais intégrer cette problématique dans leur politique de conformité et mettre en place des dispositifs internes de signalement et de traitement des alertes.
Les perspectives d’évolution du droit pénal des affaires
Au regard des réformes législatives récentes, il apparaît clairement que la lutte contre la corruption, la fraude fiscale et financière et les abus de marché demeurera une priorité pour les pouvoirs publics. Les entreprises sont donc incitées à renforcer leurs dispositifs internes de prévention et de détection des risques, ainsi qu’à se montrer plus coopératives avec les autorités compétentes afin d’éviter des sanctions pénales lourdes.
De plus, l’émergence de nouvelles problématiques, telles que la cybercriminalité ou les questions environnementales, pourrait également conduire à une évolution du droit pénal des affaires dans un avenir proche.
Ainsi, il convient pour les acteurs économiques et les professionnels du droit de rester attentifs aux évolutions législatives et jurisprudentielles en la matière, afin de se conformer aux exigences réglementaires et de limiter les risques encourus.